lundi 25 juillet 2011

Vivre en chantier

Au fur et à mesure que les murs montent, Matthieu, qui garde sa chambre dans la maison, a du mal à capter le wi-fi qui se trouve dans la maisonnette. Il doit souvent venir dans l'annexe pour bénéficier de l'internet. La vie tourne maintenant autour de cette maisonnette.
Oui, c'est un peu étriqué pour une famille de quatre personnes plus un chien. Mais avec un minimum, on se débrouille bien finalement. Je me suis bien habituée à préparer le repas dans une cuisine minuscule. Simplement il ne faut pas être deux là-dedans !

Jacques et moi traversons toujours le jardin pour aller dormir dans la maison, avec un simple matelas par terre. Nous serons chassés tôt ou tard de la maison quand les ouvriers attaqueront la toiture. Paul est le seul, pour l'instant, qui dort dans la maisonnette. Il se sent bien sur sa mezzanine et dans son lit de paquebot.


J'aime beaucoup cette maisonnette revêtue de bois. C'est la petite sœur de Jeannette. Je me demande si ce n'était pas un peu à cause d'elle que cette maison m' a plu dès la première visite. Elle me fait penser au petit cabanon que mon père a construit lui-même dans la montagne où j'ai passé mes vacances. Il portait mon prénom. Il est un symbole du bonheur de mon enfance. Il n'y avait rien, même pas l'électricité ni l'eau tout au début. On s'éclairait à la bougie. On allait chercher de l'eau loin jusqu'au puits. Mais j'y étais heureuse. Avec pas grand chose, on peut être heureux. C'est mon père qui me l'a appris.

Quand on a acheté Jeannette, la maisonnette était dans un état pitoyable sauf la structure extérieure qui a été soignée par le propriétaire précédent. Jacques a mis un an pour la rendre habitable : isolation, électricité, plomberie, cuisine, douche... tout ! Et on a fait démarrer les travaux. On a réussi à y caser à peu près tout ce qu'il faut pour notre vie. Même le piano !

Ad. nettoie et range le chantier tous les soirs avant de partir. J'imaginais le pire : le jardin entier envahi de matériaux et de débris... Mais non, nous gardons un coin du jardin pour nous. Nous pouvons même manger dehors s'il fait beau (c'est rare ce mois-ci). Il y a des fleurs. Il y a des tomates. En plein chantier, certes, mais la vie n'est pas si désagréable. A condition qu'on ne dramatise pas les poussières par ci, les désordres par là. Ça apprend aussi aux enfants qui observent les ouvriers travailler tous les jours que Rome ne se fait pas en un jour et c'est une expérience assez précieuse à notre époque qui cherche l'immédiateté.

vendredi 15 juillet 2011

Maçon, c'est un métier

Quand on parle de construire un mur au vingt-et-unième siècle, on peut imaginer un ouvrage "durable", en rondins ou en bottes de pailles. On est prêt alors à accepter que ledit mur manifeste un peu d'indépendance vis-à-vis du cordeau ou du fil à plomb.
Mais chez nous c'est du traditionnel, du bien rectangulaire, du parpaing de père de famille. La fantaisie, on s'en chargera nous-même avec le choix du papier peint. On demande à un mur qui commence chez soi de ne pas monter chez le voisin. On en attend quelques qualités géométriques comme la rectitude, la planéité, la verticalité.
C'est pourtant simple, non ?

Eh bien non : le mur qui est en train d'être construit contre la maison du voisin avait paraît-il décidé d'être moderne.
Ma constatation au 14 juillet : 1) Le mur n'est pas construit verticalement et a tendance à aller chez le voisin. Le fil à plomb révèle un écart de 5 à 10 cm entre la base et le sommet. 2) Vu d'en haut, le mur n'est pas plan. 3) L'écartement de 2cm avec la maison voisine n'est pas respecté.
Pour respecter les règles de l'art, un polystyrène de 2 cm doit être inséré entre le mur et la maison voisine pour assurer une complète indépendance des deux structures. Or comme le montre la photo ci-dessous, au stade où en est la construction, cet écartement est inégal et les deux murs viennent même en contact.

C'est tout à fait inacceptable et l'architecte qui assure le rôle de maître d’œuvre en est bien d'accord.
Aujourd'hui 15 juillet, un rafistolage a été effectué...
C'est mieux, le fameux polystyrène est à sa place. Jugée d'en haut, la planéité laisse encore à désirer mais on peut espérer qu'à la fin le crépi sera appliqué avec habileté pour rattraper le coup.
Au fait, la petite fenêtre que vous voyez s'esquisser éclairera la salle de bain.
Un renflement, à gauche, est perceptible...

samedi 2 juillet 2011

Bientôt le plancher du 1er étage


Les murs atteignent le 1er étage. Cette semaine, la dalle du 1er étage sera coulée.
Malgré un problème par-ci, un autre par-là, les travaux avancent lentement mais sûrement.
Nat. qui est parti sur un autre chantier a été remplacé, depuis trois semaines, par un autre maçon Cal. J'ai été soulagée de ne plus entendre sa radio qui chantait " Chérie FMMM !" tout au long de la journée. Cal. n'allume pas de radio. Par contre, il bavarde plus en travaillant avec son assistant Ad. Mais comme il a toujours un ton joyeux et n'arrête jamais ses mains, cela ne me gêne pas trop. Ils se parlent en Portugais. Ils sont du Cap-Vert.

Je ne connaissais rien du Cap-Vert sauf Césaria Evora. J'apprends que l'île était inhabitée avant l'arrivée des colons portugais en 1456 . La plupart des Cap-verdiens sont donc des métisses des Portugais et des esclaves africains. Je ne sais pas s'ils sont tous comme ça mais je trouve nos trois ouvriers humainement bons et chaleureux. Aucun ombre de vulgarité, plutôt polis et ponctuels. Comme je passe mes journées avec eux pendant des mois, c'est appréciable.

Nat. a un côté un peu fou et brut mais il a quelque chose d'attachant. En général, il ne parle pas (sauf que c'est la radio qui parle). Il fonce comme un sanglier qui court. Mais parfois, il est soudain euphorique à mort. Il éclatait de rire toutes les cinq minutes. Je me demande ce qu'il a dû prendre... Il aime bien prendre une cannette de bière après une journée de travail.
Cal. est plus décontracté et nonchalant. La communication entre nous est beaucoup plus facile. Il garde toujours sa bonne humeur. Pas d'alcool. Il pense à sa santé. Il préfère le coca.
Ad. est un garçon grand, sérieux et très discret, d'autant plus qu'il ne parle pas le français. Mais il est quelqu'un de sensible et il a un fond très gentil. Quand il sourit, on le sent.

La construction d'une maison n'est pas que technique. Elle est aussi une aventure humaine. Un certain rapport de force est inévitable, notamment entre l'entrepreneur M. A. et nous. Mais pour moi, ces trois ouvriers ont bien un nom et c'est un peu comme s'ils font partie de la famille qui veille sur Jeannette.